La fiction humaine (extrait)

© Nicolas Guéguen
© Nicolas Guéguen

              

                Les transats s’étalaient à perte de vue, l’alcool dégueulait des bouteilles et parfois des orifices buccaux. Écoeuré, je me promis de ne plus boire le moindre verre avant d’avoir remis l’humanité dans le droit chemin ! Mieux : en voyant un homme à la langue porcine et au regard bovin s’acharner sur un cône glacé, je me mis à échafauder rapidement un véritable plan de sauvetage. Il s’agissait, en gros, de faire prendre conscience à chacun d’entre eux des désavantages inhérents aux différentes formes de servitudes « volontaires » et moutonnières... Joli programme. Mais tellement vaste et naïf, surtout au regard de la tendance humaine à interpréter de simples et incontestables vérités. S’il me fallait justement définir l’homme, je procéderais en deux temps. Tout d’abord, j’évoquerais son cerveau hypertrophié capable, dans l’absolu, de lui faire toucher au sublime en matière de connaissances, de création et autres formes de singularités. Ensuite, je préciserais que ce même cerveau possède à la fois la faculté de conscientiser le réel et de brouiller celui-ci par la production d’illusions... En somme, la partie semblait bien mal engagée... 

                                                        

                                                         © AG